Prédication du dimanche de l’Epiphanie radiodiffusée de St Martin à Vevey le 8 janvier 2023
Prédication pour l’Epiphanie, Vevey 8.01.2023
Savez-vous que depuis quelques jours et tout spécialement aujourd’hui, autour de nos tables, il se passe quelque chose d’unique dans l’année ? Je suis sûr que plusieurs d’entre vous l’on vécu ce matin avant de venir ici et que, maintenant même, nombreux sont ceux qui… bien dorée, briochée ou fourrée d’amandes, partagent la galette des rois !
Eh oui, la galette des rois,
Et attention de ne pas vous casser les dents sur la fève, dans la galette, celle qui vous fera roi ou reine du jour, couronné.e de papier doré l’espace d’un repas.
Couronné reine ou roi ? mais, mais de quoi, à quelle occasion ? (question ouverte) : La fête de l’Epiphanie, la fête qui douze jours après le 25 décembre, clôt le temps de Noël, à savoir le 6 janvier (On la solennise le premier dimanche de janvier sauf si celui-ci est le 1er de l’an). Aussi appelée Fête des rois qui célèbre l’Epiphanie, (épi : sur, ou dessus et phanein : apparaitre), la manifestation du Christ aux Nations, illustrée par le récit de la visite des sages, des mages… dont nous avons entendu le récit tout à l’heure. (et aussi mentionnons ici, c’est le Noël des nos sœurs et frère orthodoxes).
Mais pourquoi une couronne de brioche dorée le 6 janvier ? Quel rapport peut-elle avoir avec Noël, avec la venue du Christ ?
Pour le savoir, il faut d’abord aller faire un tour dans le passé, bien avant notre ère, à l’époque où Vevey s’appelait Ouiko ou Vibisco… Et pour cela : je vous invite, avec le chœur à monter dans une fameuse machine, celle à remonter le temps. Vous êtes prêts ? Attention, on démarre !
Oooooooooooooo
Bien avant notre ère, la période des longues nuits autour du solstice d’hiver, (le solstice d’hiver est le moment où la nuit est la plus longue et le jour le plus court), bien avant notre ère, cette période des longues nuits donnait lieu à de grandes craintes. « Si le soleil ne revenait pas », comme le dira bien plus tard notre grand Ramuz). De grandes craintes, donc de grands rites à la fois pour subvertir la peur et pour fêter le retour de la lumière : la fameuse fête romaine du Sol Invictus, du soleil invaincu.
Ainsi, quelques jours après le solstice, au retour de la lumière, il convenait de fêter le retour du Soleil (qui était reçu comme une divinité en ce temps là). La couronne de pain bien ronde et bien dorée, comme le soleil, matérialisait en quelque sorte ce retour de la lumière et le célébrait… et on se l’appropriait en mangeant la galette en familles…
(petite parenthèse extratemporelle : On voit bien ici le rapport avec la venue du Christ lumière du monde, soleil de justice, vainqueur des ténèbres et de la mort! On y reviendra).
Voilà pour la galette, mais pourquoi la fève alors, et pourquoi le roi ?
Pour l’apprendre, restons encore dans le passé. Il faut savoir que cette période de 12 jours autour du solstice d’hiver était aussi l’occasion d’autres festivités en l’honneur de Saturne, (lui aussi divinité), festivités qui voyaient une inversion, un retournement des valeurs en cours et notamment sur le plan du pouvoir, de l’organisation de la société. Ainsi, à cette période, dans la foule, on désignait un roi. Un roi de pacotilles, un roi qui, un jour durant, pouvait ordonner, commander, décréter n’importe quoi à n’importe qui…
(Comme on l’a fait plus tard chez nous à Carnaval, dans la même idée qu’un moment dans l’année, le bas peuple peut s’emparer du pouvoir, que ce ne sont pas toujours les riches et les puissants qui dominent tout)…
Vous commencez j’en suis sûr à percevoir le sens de tout cela : celui qui tombait sur la fève de la galette des rois devenait le roi du jour et pouvait diriger et commander à sa guise en inversant les valeurs commune l’espace d’un moment. Ce que l’histoire nous dit, c’est que les foules profitaient abondamment de ces saturnale et pas toujours pour le meilleur…
Il y a ici toutefois ici un excellent, un pertinent message, un message pour notre temps à nous, ici dans nos circonstances…
Pour le savoir, revenons à Aujourd’hui.
Le chœur peut il mettre en route la machine à revenir au présent ?
Oooooooooooooooooo
Ca va ? vous êtes bien arrivés ?
Oui… oui et non,
Le monde dans lequel nous vivons, comme celui d’il y a fort longtemps d’ailleurs, ce monde n’est pas terrible et l’année qui vient est bien incertaine…
- La guerre. La guerre en Ukraine et ailleurs, la violence indescriptible et ravageuse. Les millions de réfugiés.
- La destruction du Vivant et ses conséquences désastreuses (!) changements climatiques et perte de la biodiversité…
- Les soucis autour de l’énergie, à la fois manque possible et cause de destruction massive de la planète…
- L’immense solitude de tant de personnes lassées de côté par nos modes de vie individualistes…
C’est pas facile. C’est pas léger. Ca va dur dans notre monde. Il y a grand besoin de changements, de retournements, d’inversion, de conversion :
– de paix à la place de guerre,
– de douceur à la place de violence,
– de respect à la place d’agressions,
– de lenteur à la place de vitesse…
–
Et tout cela vis-à-vis de tout un chacun, de chaque personne, mais aussi à une échelle bien plus vaste encore : vis-à-vis du Vivant (avec V majuscule), de notre terre, de notre planète. Et nous savons que c’est une question vitale pour rien moins que la suite de l’aventure terrestre des homosapiens pas si « sapiens » que ca… que nous sommes.
Sommes-nous seuls ? Sommes-nous abandonnés à nous même devant cette tâche immense ? beaucoup le pensent, mais ici, ce matin, en jour d’Epiphanie résonne une bonne nouvelle :
Ce roi, chers amis, ce roi qui inverse les choses, il est là… il est venu sur terre voici 2000 ans, c’est Jésus, c’est le Christ, nous l’avons fêté le 25 décembre, et nous célébrons sa manifestation au monde aujourd’hui ! C’est lui la lumière du monde, c’est lui qui apporte le grand retournement, la grande inversion des choses et des valeurs… C’est lui qui dit : « Heureux les pauvres, heureux les doux, heureux les miséricordieux, c’est lui qui dit : « les premiers seront les derniers », c’est qui, face à la violence répond par le pardon…, dans le découragement la détermination, dans la mort apporte la vie
C’est ça l’Evangile, c’est ça la Bonne nouvelle. Il faut le dire et le répéter ! (si on ne le dit pas, qui va le savoir ?)
La difficulté, c’est que l’Evangile n’est pas un système une logique peut être imposée d’en haut. L’Evangile ne peut pas être imposé de l’extérieur (et heureusement !), il ne peut passer que par nous, ne peut passer que par chacun nous, au travers de nous…
Comment ?
De mille et une manière. Et aujourd’hui, jour de l’Epiphanie, par ce fameux récit des mages, nous sont ouvertes quelques pistes non négligeables. Les mages nous ouvrent des voies pour avancer sur des chemins de changement, d’inversion, de conversion, de tout ce qui a besoin d’être retourné pour revenir à la lumière… C’est un itinéraire initiatique, un vrai programme de changement. Regardons cela :
- Les mages sont des intranquilles (comme le dit Marion Muller Collard), des êtres en quête, en recherche, en mouvement vers du sens, vers du neuf.
Sommes-nous des intranquilles, en quête, en recherche, en mouvement vers du sens vers de l’espérance, vers du neuf ?
- Les mages regardent le ciel, vers le haut.
Regardons-nous vers le ciel, vers le haut, vers Dieu, verts ls transcendance ? Levons-nous les yeux de nos Iphones et tablettes ?
- Ils accrochent leur vie à une étoile,
accrochons-nous nos vies à une étoile, à un idéal élevé ou restons-nous désespérément accrochés aux choses, aux objets ?
- Les mages mettent en œuvre la science de leur temps, elle leur permet d’arriver tout près du but, mais elle ne dit pas le fin mot de l’histoire. Il échappe toujours… leur savoir les conduira chez Hérode, mais ce ne sera pas la bonne adresse…
La science est fort utile, mais elle a ses limites… Ne lui demandons pas trop, laissons une place à l’intuition… à l’expérience, au bon sens…
- Les mages consultent les grands prêtres et scribes spécialistes des Ecritures,
consultons-nous les textes saints contenus dans la Bible ?
- Les mages arrivés à Bethléhem se prosternent devant un enfant…
savons-nous garder notre esprit d’enfance, de confiance, de simplicité de cœur et d’émerveillement ?
- Ils lui font des cadeaux : De l’or :
sommes-nous généreux de nos biens en faveur des plus pauvres ?
De l’encens (dont la fumée qui s’élève symbolise la prière).
Sommes-nous des femmes et des hommes de prière ?
De la myrrhe : (onguent utilisé pour embaumer les défunts) symbole d’espérance, et de résurrection.
Sommes-nous dans cette dynamique de vie au travers des morts que nous traversons on quotidien et à celle qui nous attend tous ?
- Ils écoutant leurs songes :
est-ce qu’on écoute nos songes et qu’on prend le temps de méditer, de rêver, d’être inspirés ?
- Enfin, ils repartiront par un autre chemin,
tout cela nous aide-t-il à prendre un autre chemin ?
Un autre chemin, c’est bien là la question qui peut se poser à nous en ces jours de début d’année
Au seuil de l’an neuf, au moment des bonnes résolutions, c’est l’occasion de choisir des chemins de vie, de voir qu’est-ce qui a besoin d’être inversé, renversé, converti dans nos vies.
Et là, chacun a ses réponses…
L’enfant de la crèche nous a précédé, il veut être le roi de nos cœurs.
En mangeant notre galette des rois, que l’on tombe sur la fève ou non, à la suite du Christ nous pouvons devenir nous aussi des rois qui inversent les valeurs du monde et ouvrent un avenir.
Nous en avons besoin le monde en a besoin, la nature en besoin !
Un autre chemin pour 2023, de la nouveauté dans nos vies ! c’est ce que je nous souhaite à tous pour l’an neuf !
Amen
Merci pour ce petit voyage dans le temps et ces paroles qui nous ouvrent les portes pour vivre une année vraiment nouvelle.
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